Le nombre de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire en Syrie et ailleurs continue d’augmenter de façon alarmante, mais les financements ne suivent pas. Les pays riches qui se réunissent mardi au Koweït en vue d’annoncer leurs promesses d’aide ont la possibilité de renverser la tendance, mais ils vont devoir donner davantage que l’an dernier. Oxfam souligne que, dans le cas contraire, les conséquences seraient catastrophiques pour des millions de civil-e-s en Syrie et dans les pays voisins.
Les acteurs humanitaires estiment que 8,7 milliards de dollars sont nécessaires pour porter assistance à 18 millions des personnes vivant en Syrie ou réfugiées dans les pays voisins, ce qui correspond à un peu plus d’un dollar par personne et par jour. Oxfam a établi ce que représenterait une contribution équitable au financement pour chacun des pays donateurs, compte tenu de la taille de l’économie des pays riches. À ce jour, pour 2015, seul le Royaume-Uni a promis de verser un montant correspondant à sa « juste part » avant la conférence des donateurs, et les appels humanitaires n’ont réuni que 9,8 % des fonds nécessaires.
Les promesses faites lors de la conférence des donateurs l’an dernier étaient loin de répondre aux besoins. En 2014, les appels des acteurs humanitaires visaient à réunir un montant total de 7,7 milliards de dollars pour porter assistance à la population civile, mais seulement 62,5 % avaient été reçus à la fin de l’année dernière.
« Après quatre années de crise, les appels humanitaires sont déjà réduits au strict minimum. Face à un financement insuffisant de l’aide, davantage de personnes dans le besoin devront recourir à des stratégies de survie désespérées, telles que le travail des enfants ou le mariage précoce, s’inquiète Andy Baker, qui dirige les opérations humanitaires d’Oxfam face à la crise en Syrie.
Oxfam a calculé qu’en 2014, près de la moitié des grands donateurs du monde n’ont pas contribué équitablement à l’aide humanitaire, compte tenu de la taille de leur économie. C’est notamment le cas de la Russie (7 %), de l’Australie (28 %) et du Japon (29 %). Parmi les États qui ont donné leur part, voire plus, citons le Koweït (1107 %), les Émirats arabes unis (391 %), la Norvège (254 %), le Royaume-Uni (166 %), l’Allemagne (111 %) et les États-Unis (97 %).
Ces derniers mois, les souffrances des personnes touchées par la crise se sont encore aggravées. En effet, outre que les organisations de l’ONU ont dû réduire considérablement leur aide pourtant vitale, les pays voisins restreignent de plus en plus l’accès à leur territoire, et les civil-e-s se retrouvent piégés en Syrie.
« Au cours des trois premiers mois de 2015, les financements sont arrivés avec une lenteur exaspérante. Cette année, il manque 90,2 % des fonds à mobiliser suite aux appels humanitaires de l’ONU et de la Croix-Rouge*, précise Andy Baker. Les donateurs réunis au Koweït doivent faire mieux que l’an dernier, sur un plan tant individuel que collectif, pour ne pas décevoir les espoirs des millions de personnes dans le besoin. »
Outre le financement complet des opérations humanitaires, les États se réunissant au Koweït doivent également trouver d’autres moyens de faire face à la crise qui continue de s’aggraver. Oxfam appelle de nouveau les pays riches à accueillir 5 % des réfugiés parmi les plus vulnérables d’ici à la fin 2015, dans le cadre de solutions de réinstallation ou d’autres formes d’admission humanitaire. À l’heure actuelle, les engagements de réinstallation concernent moins de 2 % des 3,9 millions de réfugiés, et ce sans calendrier arrêté.
« L’analyse d’Oxfam montre que nombre de pays européens n’offrent aucune bouée de sauvetage. Le Royaume-Uni, l’Italie, l’Espagne, la Pologne et le Portugal font partie de ces pays qui ont promis moins de 10 % de leur juste part de places de réinstallation ou autres formes d’admission humanitaire. Chaque jour nous rappelle que des réfugiés vivant dans des conditions épouvantables risquent leur vie en affrontant les dangers d’une traversée de la Méditerranée. L’Europe ne doit plus fermer les yeux », insiste Andy Baker.
Des pays ont montré l’exemple. L’an dernier, l’Allemagne, la Norvège, le Canada, la Suède et la Suisse se sont tous engagés à apporter une contribution à la réinstallation et aux financements humanitaires dépassant ou approchant leur juste part. Quant à l’Australie, ses promesses sont équitables en matière de réinstallation, mais restent loin du compte en ce qui concerne l’aide humanitaire.
Outre le financement de l’aide et la réinstallation, les États présents au Koweït ont suffisamment de poids pour mettre fin à la crise et aux terribles exactions dont souffre la population civile en Syrie. Conformément au communiqué de Genève de 2012, ils doivent s’unir pour appeler à relancer un processus politique de transition. Tous les États doivent également arrêter les envois d’armes et de munitions en Syrie, qui continuent d’alimenter le conflit.
* Sur le montant total des appels humanitaires lancés par l’ONU, le CICR et le FICR, au 26 mars 2015
Notes aux rédactions
- L’analyse complète des financements reçus en 2014 et 2015 et des promesses de réinstallation faites à ce jour est disponible en ligne
- Des exemples du Liban et de la Jordanie, illustrant les conséquences du manque d’aide pour les réfugiés.
- Oxfam a mis au point deux indicateurs clés pour déterminer le niveau d’engagement requis de chaque pays riche afin de contribuer équitablement à alléger les souffrances des personnes touchées par la crise en Syrie :
- La contribution de chaque pays au financement des efforts humanitaires par rapport à son poids économique (selon le revenu national brut).
- Le nombre de réfugiés syriens dans les pays voisins auxquels chaque État a promis d’accorder refuge par des offres de réinstallation ou d’autres formes de protection humanitaire, là encore par rapport à la taille de l’économie du pays donateur. Cela ne comprend pas le nombre de personnes ayant demandé et reçu le droit d’asile, dans la mesure où les États ont, en vertu du droit international, des obligations précises vis-à-vis des personnes qui arrivent sur leur territoire en demandant l’asile.
Contact
Des porte-parole d’Oxfam au Koweït, à Beyrouth et à Amman peuvent donner des interviews en anglais, arabe et français. Contact : Joëlle Bassoul – jbassoul@oxfam.org.uk ou +961-71525218 @jobassoul.
- L’analyse complète des financements reçus en 2014 et 2015 et des promesses de réinstallation faites à ce jour est disponible en ligne
- Des exemples du Liban et de la Jordanie, illustrant les conséquences du manque d’aide pour les réfugiés.
- Oxfam a mis au point deux indicateurs clés pour déterminer le niveau d’engagement requis de chaque pays riche afin de contribuer équitablement à alléger les souffrances des personnes touchées par la crise en Syrie :
- La contribution de chaque pays au financement des efforts humanitaires par rapport à son poids économique (selon le revenu national brut).
- Le nombre de réfugiés syriens dans les pays voisins auxquels chaque État a promis d’accorder refuge par des offres de réinstallation ou d’autres formes de protection humanitaire, là encore par rapport à la taille de l’économie du pays donateur. Cela ne comprend pas le nombre de personnes ayant demandé et reçu le droit d’asile, dans la mesure où les États ont, en vertu du droit international, des obligations précises vis-à-vis des personnes qui arrivent sur leur territoire en demandant l’asile.
Des porte-parole d’Oxfam au Koweït, à Beyrouth et à Amman peuvent donner des interviews en anglais, arabe et français. Contact : Joëlle Bassoul – jbassoul@oxfam.org.uk ou +961-71525218 @jobassoul.