Depuis 2015, la situation sécuritaire du Burkina Faso ne cesse de se dégrader avec des conséquences humanitaires désastreuses. A cette crise qui a déplacé plus de 840 000 personnes à l'intérieur du pays, dont 84 % sont des femmes et des enfants, s’est greffée, depuis le mois de mars 2020, la pandémie de coronavirus.
En date du 10 mai, 748 cas ont été confirmés dans le pays, avec 48 décès. Cependant, la capacité de dépistage relativement limitée pourrait bien cacher un nombre de cas beaucoup plus élevé. La population vit dans cette double crise avec des défis immenses à relever pour survivre.
Des femmes pour la paix
Dans un pays où la distribution des rôles à l’échelle de la société confine la femme à des tâches domestiques, Naomie Oudraogo Bicaba se bat pour la paix à travers le Réseau des femmes de foi pour la paix (REFFOP), une organisation partenaire d'Oxfam dans le domaine de la consolidation de la paix.
Naomie est convaincue que les femmes ont un rôle à jouer dans la construction de la cohésion sociale : « La femme est dotée de douceur. À la maison, dans la famille, l'éducation des enfants incombe davantage aux femmes. Nous devons mettre les femmes au cœur de la construction de la paix car elles peuvent apporter beaucoup en tant que mères, filles, sœurs », explique-t-elle.
« Ils s’en prennent d’abord aux hommes. On tue ton mari devant toi. Et même s'ils ne tuent pas ton mari, il s’enfuit. Il a peur et laisse la femme avec les enfants. Tu es là et tu deviens cheffe de famille. »
L’apport de la femme pour construire la cohésion sociale est d’autant plus nécessaire au sein des familles traumatisées par les violences. Dans le cadre de son travail, Naomie réside et intervient à Nag-rengo, une commune rurale située à 40 kilomètres de la capitale, Ouagadougou, où plus de 16 000 personnes déplacées ont trouvé refuge après avoir fui les violences des groupes armés. La majorité d'entre elles sont des femmes et des enfants qui sont les plus touchés par le conflit
Représentant la Fédération des églises et missions évangéliques du Burkina au sein du REFFOP en tant que trésorière, Naomie, à l’instar des représentantes catholiques et musulmanes, s’investit avec détermination dans la cause du dialogue interreligieux et du vivre-ensemble auprès des femmes, peu importe leur provenance ou leur confession religieuse : « Je vais aider mes sœurs à mieux éduquer leurs enfants afin qu’ils deviennent des acteurs de paix et non des acteurs de conflits », insiste-t-elle.
Un sentiment de compassion
Aussi douloureux soit-il, Naomie prend souvent le temps de rendre visite à ces femmes déracinées de leur terre qui n’ont nulle part où aller : « Lorsque j’arrive, j’ai un sentiment de compassion, parce que je me mets à leur place. Mon cœur se serre de voir ces femmes dignes subir cette situation ». Et avec le coronavirus qui se profile, la situation est encore plus complexe pour ces femmes vivant dans des espaces surpeuplés avec des conditions d'hygiène très basiques et souvent un manque d'eau.
« Ce n'est pas un simple conflit avec des individus. C’est aussi un conflit avec une maladie. Si les femmes déplacées sont touchées par le virus, ce sera une catastrophe. »
Bien que la situation de son pays soit de plus en plus difficile, Naomie ne perd pas espoir, convaincue que « si les femmes sont impliquées [dans un processus de paix], nous allons y arriver ». Pour cela, elle espère ardemment une table ronde autour de laquelle toutes les parties prenantes, dont les femmes, vont s'asseoir et trouver une solution pour un retour durable à la paix au Burkina Faso.
Oxfam est présente au Burkina Faso depuis les années 70. Avec nos partenaires locaux, nous soutenons la population burkinabè en fournissant une aide alimentaire, en protection, en eau et assainissement, en renforçant l'accès aux services sociaux et de base et aux moyens de subsistance. Nous travaillons également avec nos partenaires pour renforcer la résilience des communautés et pour assurer la cohésion sociale, notamment par des projets de consolidation de la paix avec des partenaires tels que le REFFOP.
Photos: Sylvain Cherkaoui/Oxfam