Sans emploi, une réinstallation enfoncerait des milliers de survivants du typhon Haiyan dans la pauvreté

Publié: 29th avril 2014

Oxfam prévient que jusqu’à 200 000 personnes sinistrées par le typhon meurtrier Haiyan, qui s’est abattu sur les Philippines en novembre dernier, risquent de s’enfoncer davantage encore dans la pauvreté si le gouvernement ne tient pas suffisamment compte de leurs moyens de subsistance dans ses plans de réinstallation.

Également connu sous le nom de Yolanda aux Philippines, Haiyan est à ce jour le plus puissant cyclone jamais enregistré à toucher terre. Il a fait 8 000 morts et quatre millions de sans-abri.

Oxfam publie aujourd’hui un nouveau rapport sur la stratégie de réinstallation des survivants : « The Right Move? Ensuring durable relocation after typhoon Haiyan ». Selon l’organisation humanitaire internationale, les sinistrés risquant d’être déplacés se soucient en priorité d’avoir une source de revenu. Pourtant, le gouvernement prévoit de déplacer 200 000 personnes loin de la côte pour les protéger contre de futures tempêtes, sans que ses plans de réinstallation ne tiennent compte des perspectives d’emploi. Les pêcheurs, les ouvriers agricoles et les commerçants font partie des personnes, hommes et femmes, les plus touchées.

Ces constats se fondent sur une enquête menée par Oxfam auprès des communautés ciblées par les mesures de réinstallation prévues suite au passage du typhon Haiyan dans les provinces du Samar oriental, de Leyte et de Cebu. Près de la moitié (49 %) des 453 personnes interrogées ont déclaré que la possibilité de gagner un revenu grâce à leur emploi actuel ou d’un nouveau travail devrait être le facteur primordial à prendre en compte dans les plans de réinstallation. Leur deuxième grande préoccupation était la sécurité, pour 32 % d’entre elles.

« Le gouvernement s’est engagé sur le principe de "reconstruire en mieux", mais il doit encore démontrer son engagement dans son programme de réinstallation, explique Justin Morgan, directeur pays d’Oxfam aux Philippines. La réinstallation n’est pas seulement une question de relogement, mais aussi d’emploi, de sécurité et de transport. Ces aspects ne sauraient être relégués au second plan.

« Des millions de pesos seront consacrés à ce programme de réinstallation. En cas de mauvaise mise en œuvre, tout le monde y perdra. Ces femmes et ces hommes se voient contraints de choisir entre vivre en sécurité et nourrir leur famille. Le gouvernement risque en outre de gaspiller de précieuses ressources qui pourraient servir à vraiment améliorer les conditions de vie des personnes en situation de pauvreté. »

Il arrive que les sites de réinstallation se trouvent à 15 km des habitations actuelles. À Leyte, plusieurs personnes ont déclaré à Oxfam qu’elles avaient décidé de ne pas déménager compte tenu du coût trop élevé du transport entre leurs nouveaux logements et la côte où elles travaillent. Bien que beaucoup craignent de rester à proximité de la mer et s’inquiètent pour la sécurité de leur famille, il leur faut pouvoir gagner leur vie.

Selon le rapport d’Oxfam, seulement 7 % des personnes interrogées avaient été consultées ou informées des plans de réinstallation par l’Administration. Fait inquiétant, 81 % ont affirmé n’avoir pas connaissance de leurs droits en matière de réinstallation, tandis qu’une personne sur trois estimait n’avoir d’autre choix que d’accepter la réinstallation. La moitié ont déclaré ne pas savoir où elles allaient être relogées.

« Le gouvernement a l’obligation constitutionnelle de consulter les communautés sur l’ensemble des modalités de leur réinstallation, s’insurge Justin Morgan. Il est essentiel que les autorités consultent les populations pour comprendre leurs priorités. Les interventions lors de catastrophes précédentes ont montré qu’en l’absence de consultation, les plans de réinstallation ne correspondent pas aux besoins des personnes concernées, qui finalement quittent leur nouveau logement ou s’enfoncent dans la pauvreté. »

En abattant 33 millions de cocotiers dans les Visayas orientales, en anéantissant l’équivalent d’un million de tonnes de récoltes et de cultures et en endommageant ou détruisant 30 000 bateaux de pêche, le typhon Haiyan a privé six millions de travailleuses et travailleurs de leurs moyens de subsistance.

Ces femmes et ces hommes se voient contraints de choisir entre vivre en sécurité et nourrir leur famille.
Justin Morgan
directeur pays d’Oxfam aux Philippines

Notes aux rédactions

Téléchargez le rapport d’Oxfam (en anglais uniquement)

Des témoignages et des photos sont également disponibles.

Oxfam est active aux Philippines depuis 1978. Suite à la catastrophe du typhon Haiyan, l’organisation a porté assistance à 650 000 personnes dans les provinces de Leyte, du Samar oriental et de Cebu, fournissant de l’eau potable, des produits et installations d’assainissement, des abris, ainsi que des services de renforcement de la sécurité alimentaire en situation d’urgence. Oxfam aide également des familles pauvres à gagner leur vie dans le cadre d’initiatives « travail contre argent » consistant à rémunérer en espèces des travaux tels que le déblaiement des cocotiers, la distribution de semences de riz et la réparation et reconstruction de bateaux de pêche.

Contact

Aux Philippines : Rhea Catada, responsable des relations médias, +63 9173654649 rcatada@oxfam.org.uk