Le présent document a pour objet de compiler et de résumer une série d’actions qui seront entreprises ou ont été proposées par la direction d’Oxfam, en réponse à la crise actuelle que traverse l’organisation. L’objectif est de délivrer une réponse urgente, globale et responsable pour toute la confédération Oxfam, qui mènera à des changements durables et profonds.
Nous cherchons à provoquer les changements nécessaires dans nos politiques, nos pratiques et notre culture internes pour mettre fin à l’exploitation, aux abus et au harcèlement au sein de toute notre confédération, de protéger les personnes avec qui nous travaillons et d’assurer que justice soit rendue pour les survivant-e-s d’abus.
Les actions décrites ici visent principalement à :
- Faire la preuve d’un engagement véritable de transparence et de redevabilité, notamment grâce à la création d’une commission indépendante pour revoir notre travail passé et présent. Ses résultats seront rendus publics et ses recommandations détermineront les actions mises en place par la suite.
- Changer les politiques, les pratiques et les mentalités au sein d’Oxfam, notamment en augmentant de manière significative les ressources dédiées à la prévention, à la protection, à la formation et au soutien sur les questions de genre.
- Travailler avec les organisations du secteur humanitaire et du développement pour empêcher ces situations de survenir à nouveau, notamment en travaillant à réformer les procédures de recrutement et de vérification des antécédents, afin d’empêcher des personnes ayant eu des comportements inacceptables de naviguer entre différentes organisations.
1. Nommer une commission indépendante de haut niveau sur les comportements sexuels inappropriés, la redevabilité et le changement de culture interne
Oxfam ne saurait s’exonérer des accusations formulées à son encontre et ne doit pas même essayer. La commission de haut niveau tiendra ses distances avec Oxfam et sera composée d’éminentes personnalités féminines du monde entier.
Les attributions de cette commission indépendante seront déterminées par sa présidente, en consultation avec le conseil d’administration d’Oxfam International. Elle aura les pleins pouvoirs pour examiner les affaires, les politiques, les pratiques et les mentalités passées et présentes. Le cadre de référence de la commission sera arrêté par la présidente de la commission et le conseil d’administration d’Oxfam International. La commission entendra les critiques, les plaintes et les accusations émises, notamment en ce qui concerne les abus de pouvoir et les comportements sexuels répréhensibles. Elle s’efforcera d’établir un historique complet, qui sera rendu public.
Oxfam suivra les orientations fournies par les recommandations de la commission, quelles qu’elles soient.
2.Réaffirmer l’engagement de toute la confédération Oxfam de collaborer avec toutes les autorités compétences, notamment les organismes de régulations et les États
Nous redoublerons d’efforts pour faire preuve de transparence et de la volonté de coopérer avec les autorités compétentes de façon à rendre justice aux survivant-e-s d’abus et à prévenir toute forme d’abus à l’avenir.
Cela impliquera de se mettre en rapport avec les organismes de régulation et les gouvernements pour offrir de leur communiquer toutes les informations dont ils souhaiteraient prendre connaissance. Notre objectif est de nous assurer que les autorités retrouvent confiance dans nos politiques et procédures, grâce à notre engagement manifeste de transparence.
3. Réexaminer des affaires passées et inciter d’autres témoins ou survivant-e-s à se manifester
Nous devons en profiter pour offrir à quiconque aurait souffert du comportement inapproprié de membres du personnel d’Oxfam la possibilité de rouvrir d’anciens dossiers et de réévaluer s’ils ont ou non été convenablement traités. Dans la négative, nous prendrons dans la mesure du possible des mesures énergiques et conformes à nos valeurs. Cela pourrait conduire à des sanctions disciplinaires, voire au licenciement de membres actuel du personnel.
Nous continuerons de faire savoir à notre personnel, nos bénévoles, nos partenaires et nos bénéficiaires qu’il leur est possible et vivement recommandé de signaler tout cas qu’ils auraient vécu ou dont ils auraient été témoins, sans se sentir en mesure de le signaler sur le moment, ou dont ils estimeraient que leur signalement n’a pas été traité convenablement à l’époque.
Nous veillerons à disposer d’un système d’alerte efficace, facile à utiliser pour les membres du personnel, les bénévoles et les personnes extérieures à Oxfam. Davantage de ressources seront mises à disposition pour ce faire, dans l’immédiat et à long terme.
4. Accroître sans délai nos investissements dans la prévention et la protection
Manifestement, nous n’avons jusqu’à présent pas suffisamment consacré de ressources aux mesures de prévention à l’échelle de la confédération. Nous augmenterons considérablement nos investissements en termes de budget et d’effectifs, afin de s’assurer que les ressources nécessaires sont en place pour garantir la sécurité et le bien-être de toutes celles et ceux qui entrent en contact avec des membres du personnel d’Oxfam, où que ce soit dans le monde.
Nous augmenterons également nos investissements dans la formation et la sensibilisation aux questions de genre dans l’ensemble de la confédération, y compris le recrutement de responsables genre dans les équipes d’intervention humanitaire et de programmes de développement.
5. Renforcer les processus internes
Un certain nombre de mesures sont déjà entreprises afin d’améliorer nos processus internes. Notamment, nous mettons en place une base de données qui permettra d’éviter que des références officielles ne soient données à des personnes ayant eu des comportements inacceptables et postulant dans d’autres organisations. Il s’agit également de mesures visant à renforcer la vérification des antécédents et le recrutement du personnel, telles que : faire de l’engagement de protection un élément obligatoire de la procédure de recrutement et de sélection, ainsi que des critères de gestion des performances pour l’ensemble des responsables d’équipe, revoir entièrement l’initiation et la formation des membres du personnel, avec l’obligation de suivre une formation aux questions de prévention et de protection pour tout le personnel, former de nouveau l’ensemble du personnel pour garantir une bonne connaissance des valeurs d’Oxfam et de notre Code de conduite, et renforcer nos processus d’alerte, ainsi que d’autres mécanismes permettant de facilement signaler tout fait préoccupant.
Toutes les organisations membres de la confédération Oxfam disposeront de « points focaux prévention » qualifiés, et des « points focaux prévention » assisteront à tous les événements d’envergure organisés par Oxfam.
Nous vérifierons de nouveau que des systèmes fiables sont en place pour le signalement de toute activité présumée illégale aux autorités compétentes.
6. Renforcer une culture de tolérance zéro à l’égard du harcèlement, des abus et de l’exploitation
Nous continuerons de nous attacher à changer les mentalités qui permettent toute forme de harcèlement, d’exploitation, de discrimination ou d’abus au sein d’Oxfam et dans l’ensemble du secteur. Cela suppose d’identifier les organisations avec lesquelles collaborer et qui pourront aider Oxfam à réaliser les changements culturels nécessaires. Le groupe de travail d’Oxfam dédié à la prévention de l’exploitation et des abus sexuels (« PSEA Taskforce ») a déjà formulé des recommandations qui seront passées en revue et mises en œuvre dans les plus brefs délais.
7. Collaborer avec nos homologues du secteur pour combattre les abus physiques, sexuels et psychologiques
Reconnaissant que nous ne pourrons pas, à nous seuls, mettre en place certaines mesures qui s’imposent, nous travaillerons en collaboration avec le reste du secteur pour garantir la sécurité de toute personne. Cela est particulièrement nécessaire concernant les mesures pour empêcher les personnes qui ont eu un comportement inacceptable et ont perdu leur emploi de passer dans une autre organisation. Nous contribuerons activement aux initiatives conjointes des ONG internationales. Nous collaborerons avec les agences des Nations unies, l’International Civil Society Centre et d’autres plateformes conjointes d’ONG, afin d’adopter des propositions concrètes qui nous permettront de progresser à l’échelle du secteur.
Dans ce cadre, nous contribuerons aux travaux initiés par BOND au Royaume-Uni afin de mettre au point un concept de passeport humanitaire ou de système anti-récidivistes hébergé par un organisme officiel tel que le Bureau de la coordination des affaires humanitaires. Nous soutiendrons ces types d’initiatives de toutes les manières possibles.
8. Collaborer activement avec nos partenaires et alliés, en particulier avec les organisations de défense des droits des femmes
Nous contacterons nos partenaires et alliés pour restaurer la confiance et solliciter leur avis sur les enseignements à tirer et les améliorations à apporter. Il nous appartient tout particulièrement de nous ouvrir aux organisations de défense des droits des femmes et à celles qui travaillent dans le domaine de la prévention de l’exploitation et des abus sexuels (PSEA) afin de répondre à leurs questions, d’entendre leurs réflexions et leurs préoccupations, et de veiller à définir nos réponses en consultation avec elles, sur la base de leurs contributions et de leur savoir-faire.
Nous inviterons les organisations de défense des droits des femmes de toutes les régions du monde à se réunir avec nous, les autorités publiques et d’autres parties prenantes.
9. Écouter le public
Nous nous rapprocherons du public, aussi bien lors d’événements publics que de débats en ligne. Nous serons à l’écoute des personnes qui nous soutiennent à travers le monde et nous apprendrons de leurs avis. Nous établirons un véritable dialogue avec celles-ci, répondant à leurs préoccupations et leur expliquant les mesures que nous prenons pour apprendre et changer.
10. Réaffirmer et renforcer notre engagement en matière de justice entre les femmes et les hommes en externe
Nous réitérerons et renforcerons notre engagement d’inscrire les droits des femmes et la justice entre les femmes et les hommes au cœur de notre action. Reconnaissant que notre organisation a encore beaucoup à apprendre et à rectifier, Oxfam continuera d’investir davantage dans le travail de plaidoyer, les campagnes et les programmes visant à combattre les injustices dont souffrent les femmes en situation de pauvreté dans le monde. Cela suppose de nous attaquer aux normes sociales qui alimentent les violences faites aux femmes, de mener campagne pour corriger les déséquilibres de pouvoir systématiques qui enferment les femmes dans la pauvreté, et de nous associer aux organisations féministes et de défense des droits des femmes pour combattre les injustices basées sur le genre à tous les échelons. Cela passe également par le renforcement de nos programmes humanitaires et de développement permettant d’apporter un changement réel et durable dans la vie des femmes en situation de pauvreté.